Journal de fin de jeunesse

Craquage

"Hoy tengo el diablo en el cuerpo, procura de verlo, delirio de verlo… Esta obsesion de querer, es infierno ? o es gloria ? no lo se!!!!!"

Les dimanches comme ça, froids et tardifs, ça me déprime. Surtout quand j’ai le coeur gros comme une patate.
Je ne devrais penser qu’à mon BTS. Rien qu’à ça. D’ailleurs, il est presque midi. Et je devrais déjà être en train de bosser comme une acharnée. Mon anglais par exemple. (Ma première épreuve d’anglais a lieu dans, hum, 15 jours...). Ou ma gestion. Ou mon droit.
Au lieu de ça, je ne fais que penser à lui.
Un nouveau lui est arrivé. Qui ne pouvait pas s’avérer plus proche puisqu’il travaille dans le bistrot d’à côté !
çA fait plusieurs mois déjà que je craque sur lui. Assez timidement. Juste un peu, comme ça. Le petit craquage qui donne la pêche avant d’aller au boulot. Car on sait "qu’on va le voir".
Et je le vois, derrière ma vitre. Il vient deux ou trois fois par jour fumer sa clope juste devant la boutique. En noir et blanc, dans son costume de serveur. Et depuis quelques temps, il me salue toujours; un petit coucou de la main, un joli sourire, et un "Salut" qui se dessine sur ses lèvres silencieuses.
Je le trouve beau dés que je le vois. Avant, j’oubliais ces petits saluts une fois rentrée chez moi, n’ayant d’yeux que pour Monsieur William. (C’est qui déjà lui ?). Mais depuis quelques jours, j’y pense même une fois rentrée chez moi, à l’abris des coeurs tambours. A l’abri de ses jolies oeillades brunes. J’y pense. L’autre soir par exemple, j’ai laissé la douche couler sur moi vingt minutes, tellement j’oubliais l’eau chaude et l’écologie à force de penser à lui a coups de grands sourires.

Et hier soir, je me suis décidée. A quoi ?
Avec ma collègue-copine Marie, j’ai décidé, donc, d’aller prendre un verre dans le bistrot d’à côté. Celui d’où il sort plusieurs fois dans la journée pour fumer sa clope scandaleusement sexy en face de moi. Derrière ma vitre.
J’avais sorti le grand jeu; j’avais ma robe bleu "regardez-moi dans les yeux, j’ai dis les yeux!" Par contre mes cheveux étaient tellement moches et rachitiques que j’avais acheté un chouchou. Ce qui d’ailleurs déplaisait à Marie, mais bref...
On sort du boulot, on va au bistrot. Je pensais qu’il ne serait pas là car je ne l’avais pas vu de la journée sortir et fumer sa clope.
Alors sans grand espoir, on entre dans le bistrot. Et là c’est lui qui nous accueille.

...

Il nous place au fond. Je bondis intérieurement. Tellement qu’il est beau.
Je le zyeute furtivement. Marie se marre. On attends Margaux qui dois nous rejoindre. On se marrera encore plus à trois.
C’est lui qui s’occupe de nous. Qui nous sert. Je rougis fort et rit bêtement. Enfin je crois. Enfin sûrement vu que tout le restau' est maintenant au courant que la fille qui travaille à côté craque sur le serveur.
Je le surprends à me regarder des fois. Très sérieux. Je ne sais pas quoi penser. C’est devenu tellement difficile de plaire à quelqu’un quand tu ne cherches plus à t’amuser!
Il vient s’enquérir de nous, voir si tout va bien. Il sourit bien.
Margaux arrive.

Plus tard, il vient nous dire qu’il doit nous encaisser vu qu’on est sa dernière table et qu’il est mort de fatigue et qui rêve d’aller chez lui pour aller se mettre au lit… Il nous dis ça. Il me regarde. Je surchauffe. Je ne sais toujours pas quoi penser. Quand c’est à mon tour de payer, je ne trouve pas ma carte. Je la cherche comme une folle, puis je réalise sous ses yeux patients et souriants qu’elles est dans ma poche.
"Elle est dans ma poche." je dis. Mortifiée. Ridicule, très certainement. Absolument pas attirante.
Je lui tends. Et, je rêve ou il me fait un clin d’oeil ? ! Je suis plutôt du genre à ne voir que le négatif des choses et à toujours tout interpréter à mon désavantage. Mais là, il me semble bien que c’est un clin d’oeil, et pas un tic de la paupière. Bien sur, je me persuade pour le reste de la soirée que c’est un tic de la paupière, et pas un clin d’oeil. Les filles se marrent. Pour elles c’est bon signe.
Il s’en va. Marie, culottée, demande à la collègue moche et complètement refaite-(ratée) du beau serveur quel est le prénom de celui-ci. Elle précise que c’est pour moi "Pour la demoiselle là".
La collègue moche réponds et nous dévoile ledit prénom. Très beau prénom à consonances russes. (Je m’égare).
Puis elle ajoute que de toute façon, elle est déjà aller le voir tout à l’heure pour lui signifier que la demoiselle assise au fond était très certainement amoureuse de lui… Pour la discrétion c’est loupé, apparemment je suis grillée; même par la collègue moche. On lui demande si il a une copine. Comme je n’ai pas de chance et que je finirais seule de toute façon, elle réponds "Oui." Donc il a une copine.
Mon coeur se brise.

Là je fais preuve d’humour en écrivant. Mais je suis triste. Triste que tout, tout le temps, confirme ce que je pense déjà; l’amour ne passera pas par moi. J’en serais privée moi, de tomber amoureuse d’un homme pour qui c’est réciproque. Je me sens maudite. Condamnée à être seule. A ne jamais trouver, retrouver ça, un amour partagé.
Je me doutais qu’il avait une nana. Et voilà, la collègue moche nous le confirme. Parce-que je ne me trompe jamais. Et parce-que je n’ai jamais de chance. C’est comme ça. Evidemment, pauvre idiote ? Tu t’attendais à quoi ? A lui plaire ? A ce qu’il soit célibataire comme toi ? A ce que les choses se passent comme pour les autres : Bien ?

Je sais que ne je plais plus comme avant. J’ai l’impression que tout ça c’est fini pour moi. Je ne comprends pas trop pourquoi.

Bon, malgré ce que dis la collègue moche, je ne perds pas espoir.
Il s’est habillé pour rentrer chez lui. Il s’approche de notre table. Nous dis bonsoir. Puis me regarde dans les yeux avec un sourire affolant et me dis : "A très bientôt"...

çA veut dire quoi "A très bientôt?" çA veut dire qu’on va se revoir très bientôt lui et moi ? En tête à tête ?

Je n’ai pas confiance en la collègue moche qui a l’air d’une peste, moqueuse. Mais comme je suis un peu éméchée, je lui dis que : c’est lui là aussi ! Qui me fais des coucou à travers la vitre quand il vient fumer sa clope!
Elle me dit que c’est bon signe, que c’est carrément une perche qu’il me tend, et tout ça… En gros elle me fait comprendre que rien n’est figé. Même s’il a une nana. Et que demain elle va lui dire. Mais lui dire quoi ? Elle me rassure pas cette nana.
Déjà, je n’aurais jamais du lui dire pour les "coucous". Je suis sure que cette garce va s’en servir contre moi. C’est humiliant. J’aurais du me taire. Maintenant à ses yeux à lui je vais passer pour la pauvre fille pathétique qui attends lamentablement ses petits coucous. Qui s’est agrippé à ça comme si elle n’avait rien d’autre dans sa vie… L’horreur. Je vais devenir tout sauf séduisante à ses yeux.
Du coup je me dis que c’est mort.
Aujourd’hui il travaille avec la collègue moche. Je me demande ce qu’elle va lui dire. Le truc des "coucous" ? : "Bah alors, la p’tite nénette d’à côté m’a dit que tu lui faisais coucou!"La honte. Elle va sûrement ajouter qu’en partant j’ai cassé un verre avec mon sac. Pour bien m’achever.
Je n’ai pas confiance dans les filles. Surtout dans les filles moches.

Marie me dit que j’ai fais ce qu’il fallait. Et que maintenant c’est à lui de venir à moi.
Mouais.

Comment réviser dans ses conditions ?
Et merde!
J’ai peur qu’il vienne plus me faire coucou du coup.