Journal de fin de jeunesse

Le cirque

Je viens d’entendre le camion abhorré, accompagnée de sa petite musique dansante et de son annonce meurtrière; le camion du cirque. Lieu de torture, de souffrance et d’esclavage pour des milliers d’animaux, DÉNATURÉS. Lieu de joie factice et de fous-rires trompeurs (et trompés), qui fait briller les yeux de milliers d’enfants, INNOCENTS, les pauvres, comment pourraient-ils avoir idée de la foire aux horreurs qui se trame sous leurs yeux brillants ?.
Le cirque. Quelle honte !

J’aime les acrobates et les paillettes, les trapèzes et les clowns tristes, les balles qui volent et retombent dans des mains entraînées. J’aime la magie et ses trucages....
Mais jamais, jamais, je n’accepterais d’entendre encore une fois le fouet du dompteur de fauves qui claquent dans les airs, menace ignoble et terroriste. Et les nobles félins, de qui on a beaucoup à apprendre, terrorisés devant leur frayeur absolue (et inégalable); le feu. Et n’ayant que d’autres choix que de sauter à travers, les larmes aux yeux, la peur au ventre, tout instinct sauvage et digne effacé, relégué au rang de souvenir lointain; du souvenir de la brousse et de la chasse, de la chaleur terrible et des petits boules de poils à nourrir, agaçantes, mignonnes et promesse de vie, et d’éternité de l’espèce. Tout cette magnifiçance écrasée, explosée dans un coup de fouet qui claque dans les airs.....
Il ne reste que l’oubli, l’oubli de la nature même de ces animaux et des autres, éléphants qu’on force à prendre des postures contre-nature dans un tonnerre d’applaudissement macabre, chevaux qu’on lance au galop dans un minuscule et ridicule cercle sans fin.... Ces animaux, au cirque, on en a fait des bêtes craintives et dénaturés, faciles à dompter, facile à maîtriser. Pour cacher notre peur, notre peur de la nature même. On enferme la nature dans une boîte, aseptisée, sécurisée ("wahooouuu, quel courage ce dompteur, quel homme admirable!! ! il a apprivoisé des lions!!!!" "Mais, imbécile, ce n’est pas lui la cause de ça, c’est le feu, le feu en tout point et la terreur qu’il inspire!"). Et ainsi, la nature devient notre esclave. Et alors, l’Homme est rassuré. Rassuré. Voilà les cirques.

On applaudit bien fort ! Et maintenant sous vos yeux ébahits, l’éléphants va danser une valse!!!!!!

Voilà le cirque, lieu de la souffrance et de la dénaturalisation d’êtres splendides et intemporels. J’ai envie de pleurer.
Putain de monde, putain de monde humain!! !

Il a été prouvé que l’espèce humaine est la seule de toutes les espèces animales qui, rayée de la Terre, ne créerait pas de déséquilibre. Le Loup disparu, un déséquilibre apparaîtrait, le Mouton disparu et il en serait de même. Par contre, enlevons l’Homme, et tout ira bien, aucun déséquilibre. Une parfaite harmonie.
Alors : Nous ne sommes que le cancer de la Terre, arrêtons de nous prendre pour des dieux.

Et par pitié, lâchez vos fouets, éteignez le feu....