Journal de fin de jeunesse

Ce qu'il y a de drôle là dedans/Falafels/La peur brute

Aujourd’hui, j’étais tellement mal après avoir vu les images de la réalité des abattoirs. Je pleurais, j’avais la sensation d’étouffement que je déteste, celle du chagrin sans réconfort possible. Ni envisageable.

Oui j’étais très mal, incapable de surpasser cette rage. Alors, j’ai sorti toute la viande qui me restait au congélateur; à savoir 3 steacks hachés et une merguez hallal. Je les ai pris et je les ai monté chez D. mon voisin du dessus (que je ré-adore!). Quand il a ouvert la porte, il a halluciné de me voir là, avec ma viande congelée dans les bras et les larmes aux yeux. Complètement agitée.
Je me suis précipitée sur son congélateur et ai presque jeté la viande à l’intérieur!
Puis, il m’a demandé ce que j’avais et j’ai fondu en larmes, incapable de retenir ma détresse. L’horreur de cette souffrance brute, pure, aperçue dans les yeux de la vache, filmée en gros plan lors de son calvaire.
Il m’a pris dans ses bras, un peu maladroit...
C’est drôle en y repensant, comme situation.

Il m’a dit qu’il n’avait pas compris toute cette viande dans mes mains, songeant un instant que j’étais devenu folle et que je venais lui faire une offrande, comme si je le prenais pour Boudha ou quelque-chose dans le style.

Hier, on est allé à Paris ensemble. En voiture. Il devait apporter quelque-chose à un client et il voulait qu’on mange ensemble après.
D’abord, on est donc allé voire son client, un Portugais avec un accent à tomber (et un cul aussi), et son équipe d’installateurs : un Juif (bien canon) et un Arabe (avec une tête de Blanc et de petit branleur). Ils m’ont fait marrer tous les trois, le Juif, l’Arabe et le Portugais, une vraie équipe de bras cassé.
Puis, on est allé au Marais rue des Rosiers, car ça faisait longtemps que je voulais enfin goûter des Falafels. J’adore cette rue. Je m’y sens intensément dépaysé. Et l’odeur des Falafels est irrésistible. Enfin, j’y ai goûté !

Ce qui m’a gêné c’est que D. était assez mal regardé dans la rue; un grand Black (musulman de surcroît, mais ça c’est pas écrit sur son front), ça doit évoquer des mauvais souvenirs parmis les badeaux de la rue des Rosiers...
On s’est régalé, et je me suis goinffré. J’ai honte. Je veux tellement mincir des cuisses et me débarrasser de cette cellulite insupportable au niveau des genoux qui me rends si moche, si complexée. (Pourquoi ma cellulite ne se trouve t-elle pas en haut des cuisses, comme tout le monde ? Je pourrais reporter des jupes courtes si c’était le cas… Mais non, moi c’est en bas, c’est visible, ça m’empâte. J’ai vraiment la poisse merde!)
Ensuite, on est allé goûter dans une boulangerie de Châtelet une espèce de brioche à la praline qui nous avait vraiment fait envie. Mais, blindés comme on était, on n’en a pas acheté, heureusement pour mes cuisses.
Finalement, on est rentré et j’ai conduit de Villeneuve-St-Georges à Melun.... Non sans moment de panique, et ce putain de pieds qui reste inexplicablement vissé à la pédale d’embrayage dans ces moments là!
C’est compliqué cette histoire avec D.:
Il voulait être avec moi. Moi non au final. Je l’ai plus ou moins évincé. Il a décidé de prendre ses distances avec moi, pour ne pas être déçu. Mais je l’adore et bon, j’aime être avec lui et on passe des supers moments. Alors là depuis dimanche, ayant "mis les choses au clair", on se revoit. Mais je me sens coupable. Je ne me comprends pas. Et surtout, je n’arrive pas à définir notre relation. En même temps, nul besoin de la définir..... C’est un faux problème ce que j’avance là.

Oh, mais quelle horreur. Quand je repense à ces images. À cette réalité si proche. À cette réalité révoltante, et maintenant ancrée dans ma tête. Là pour toujours. C’est énorme, violent, à vomir, à tout casser. çA se passe toutes les nuits. Sans exceptions. Toutes les nuits. Alors que moi je dors, au chaud, en vie et en paix, l’horreur se répète. Pour les animaux qu’on transporte. L’horreur : la fatalité d’une mort atroce imminente, sans possibilité ne serait-ce que d’espérer y échapper. Tout y est prévu, organisé et conçu pour rendre la mort omniprésente, obligatoire. (Comme les camps de la mort, exactement).
Et dans les yeux des bêtes : La peur brute, pure. La peur animale, sans nuance. La terreur luisante des pupilles dilatées. L’incompréhension. L’incompréhension épouvantable de ce qui arrive. De ce qui leur arrive. Et la douleur survient. Inexplicable. Terrassante. Et dans les yeux des bêtes encore, suppliantes, au fond du cauchemar sans réveil. Dans leurs yeux, la dernière question (qui s’éternise) : POURQUOI?