Journal de fin de jeunesse

Carlos 2ème partie (C'est ton Fantôme que j'aime)

Hier, oui, j’ai parlé avec Carlos.

Il était heureux de savoir que j’allais revenir au Mexique en juillet. Il a dit, comme ça, cotonneux, il a dit :

" Tu vas et tu viens ici au Mexique, comme si tu vivais au coin de la rue".

J’ai dis que je m’offrais la chance de le faire. De pouvoir le faire. Que c’était énorme. Que c’était comme un rêve. Et, j’ai pensé sans lui dire, que j’en tremblais d’émotion.
Je lui ai dis, aussi, qu’on irait à la plage tous les deux. Il a promis que oui. Puis, j’ai voulu savoir si il avait "una novia" *. Et, oui, il en a une ! C’est pour ça, le coeur en miettes d’hier. Et : la ballade dans les champs. Et : le cerf.

Je lui ai alors dis que je refusais d’aller à la plage à cause de ça. A cause de la novia Celeste. Celeste. La Celestina. La fille la plus belle qu’il m’ai été donné de voire, jamais. La fille qui fait mal aux yeux. Su novia...
Carlos, il a dit que ça lui faisait peur, un peu, la plage avec moi et la novia derrière.
J’imagine que c’est Celeste. Toujours, ça a été Celeste. J’espère que c’est elle, familière, aimée comme un soeur par lui. Faute de mieux.
J’espère que ce n’est pas une autre. Une nouvelle. Qui m’aurait occulté…

De le voire, comme ça, j’avais une envie terrible de l’embrasser. Un désir violent et frustré de l’embrasser.
On a parlé, encore, de notre amour jamais vécu. Jamais libre de s’épanouir. Des circonstances, ce mot infâme.
On a parlé de ce souvenir, encore inexistant; le notre : celui de nous deux ensembles.
Et il a dit. Il l’a dit :

"Tu n’es pas là Anne. Tu es loin"

Il a ajouté, aussi, que si je restais là bas, longtemps, même 3 mois, c’est avec moi qu’il serait.
Mais je ne suis pas là bas. Pas physiquement.
Qu’il y avait ces moments là, ceux où il m’aimait.
Je lui ai dis que c’était impossible qu’il m’aime. Qu’il aimait une chimère, un fantasme, un souvenir.
Il m’a dit que, c’est mon fantôme qu’il aimait.

"Amo a tu fantasma"

Et moi aussi, je lui ai fait cette déclaration là. Car je l’aime comme ça. Quand il apparaît derrière mes paupières. Quand il apparaît, même, devant les choses qui m’entourent. Et derrière les lignes des livres. Et devant les choses qui m’entourent, les floutant de sa présence fantomatique, de son adorée silhouette, fragile comme le vent. Carlos. Qui occulte de cette manière, transparente et paisible, mon univers de solitude.

Je vais le revoir. Dans moins de 3 mois, je vais le revoir. Et ses bras, ses caresses, est-ce que j’y aurais droit ?
Il a dit qu’il voulais me boire. Me dévorer. Dans l’obscurité de sa nuit, avec moi, nous saturer de caresses, de baiser, d’amour, de murmures..... (mais c’est Celeste, Celeste j’espère et pas une autre, qui a droit à tout ça, en ce moment).
Je souffre de ça. C’est absurde.

Carlos.
J’aime tout ce que je ne peux pas avoir. Mais j’aime, sincèrement. Et je n’y peux rien.
Comprenez-moi. Comprenez-moi.... (Écoutez ça)http://www.youtube.com/watch?v=HSC9GU8769Q

Hier, j’ai réussi à emporter avec moi un peu de laine qu’un mouton a accroché, généreusement, sur la clôture barbelée. Je ne me lasse pas de la sentir. C’est une odeur chaude. Qui me réconforte. C’est une odeur tendre et maternante. Plus rassurante que n’importe quelle autre… Une odeur mignonne aussi. Celle d’un petit mouton.

Aujourd’hui on est allé à Poitiers. Papa m’a emmené visiter la salle des Pas Perdu du Palais de Justice, impressionnante, qui recèle la cheminée la plus grande d’Europe.
Et la cathédrale de Poitiers également. Du XIIè siècle (!). Encore polychrome à l’intérieure. Ce qui m’a beaucoup plu.
J’ai coupé mes cheveux, un peu.
J’ai découvert un parfum magnifique; L’Eau de Serge Lutens, il évoque le linge lavé au savon de Marseille et séchant au Soleil. Splendide.

Mais tout ces moments de joie n’apaisent pas la brûlure Carlos. J’ai des cloques qui ne me lâchent plus.

* Petite Copine