Journal de fin de jeunesse

Miami Bitch

1ère partie:

C’était le samedi soir à Miami Beach.

J’avais acheté la belle robe rouge. La robe effrontée. La robe impertinente. J’avais acheté la robe. Et juste cette robe là. Rouge comme mon envie d’être désirée. La robe qui laissait voire, comme par négligence, la chute cambrée de mes reins. Et aussi, les pattes de loups qui ornent le haut de mes fesses. Et plus encore. Le commencement. Le balbutiement, à peine, de celles-ci. De mes fesses.
J’avais acheté la belle robe rouge, en arrivant à Miami. Juste dans cette optique là; Celle d’aller danser dans la moiteur latine. Et d’être la plus scandaleuse. La plus regardée. La plus désirée.
(Comme toutes les jolies filles veulent, oui. Mais plus encore. Chez moi, ce besoin d’être admirée est exacerbé.)
Et, j’ai réussi.

Avec Margaux, la chouette nana qui était volontaire avec moi au Wildlife Survival Sanctuary, on est allé danser au fameux Mango’s Tropical Club du Miami Beach.
C’était comme je le voulais. Et tout comme je me l’imaginais. C’était plein de Latinos, de filles hyper sexy et de mecs au look de gentil gangster. Un couple de danseur de salsa se donnait en spectacle sur une table. Beaux. Lancinants. Erotiquement tragiques. Tragiques dans la danse chaude, lascive, des brimées, des laissés-pour-comptes, des Latinos. Dans cette tragédie burlesque qui n’appartient qu’à eux. Dans leur tragédie devenue fête.

Et puis. C’est le bar. Le manque d’argent qui nous pousse à ne commander qu’une bière. Et juste une.
Et puis, encore. Ma beauté qui s’anime. Mon attraction qui se met en route. Mon narcissisme qui est caressée...
Le regard des hommes. De tous les hommes. Le regard qui dégouline sur moi. Comme une substance tiède. Une excrétion. J’adore ça. J’adore tellement ça. Quand je déambule, sur de moi, dans l’erreur de croire que je suis belle. Quand je déambule comme ça. Et que je sais. Que je vois. Que tous les regards glissent sur moi. Et s’accrochent, par-ci, par là.

Et puis. C’est la danse. La frénésie. Extatique. De la musique live. Jouée par un orchestre de salsa. C’est comme faire l’amour. Comme le bon sexe. C’est rituel et obsédant.
Et je danse. Comme je sais le faire. Dans une parade sexuelle assumée. Et je danse. Et m’amuse comme une petite fille. Sur cette musique que j’aime à la folie. La musique latine. Riche d’une histoire d’allers et retours sur la mer. D’une histoire de déchirures et d’esclavages. Et de bateau qui amènent. Et de bateaux qui ramènent. Et tout ça se mélange. Sur la mer. Et dans les vagues. Et la musique naît des flots. Tourmentée. Plus riche que n’importe quelle autre musique jamais jouée.
Et moi. C’est dans cette histoire là que je danse. Dans la chaleur tropical de la sueur latine. Dans ces rythmes là. La musique latine, teintée d’Afrique.
Alors, je danse. Avec tous les hommes que je veux. Pas avec tous ceux qui me veulent. Car beaucoup sont vilains. Et l’on m’écartèle. On m’arrache les bras de tous les côtés.
Et moi, je ris. Tellement ça m’amuse. Tellement je suis une petite fille en robe rouge, moi.

Certains hommes veulent que je pose avec eux sur des photos. Comme un trophée qu’ils ne remporteront jamais. Certains ci et certains ça. Un certain me propose d’aller me faire l’amour sur la plage. J’avoue que j’aimerais bien. Mais il y a M.

Avec M., c’est le matin. Et on rentre à l’hôtel.
Elle va prendre sa douche. Pendant ce temps là, je repense à la sueur qui coulait sur le torse du dernier avec qui j’ai dansé. Je me rappelle comme je regardais sa sueur.
Et je me sens tellement excitée que je me masturbe. Là. Comme ça, très vite. Pendant que M. est sous la douche. Je joui très vite. Dans l’urgence.
(Et je me dis que la nuit prochaine, il faut que je baise avec quelqu’un).

À Paris, ce n’est pas possible ça. Paris, ville grand-guignol qui se meurt dés 2h00 du matin. Qui se meurt dans les déboires et les relents d’alcools. Dans la prostitution, la violence malsaine et la vulgarité. Qui se meurt à 2h00 dans la laideur tandis que là bas, toute la beauté s’éveille.