Non ce n'était pas un rêve
J’ai cette impression, de plus en plus envahissante; cette impression que l’on vit en sursis.
De plus en plus, que l’on vit en sursis.
Non ce n’était pas un rêve.
L’amour enveloppant, bouleversant, dans le demi-sommeil du trajet en avion.
Les longues marches dans la ville, la bienveillance entre nous, sous le soleil, enfin.
Les fous rire dans la mer, les jeux de raquettes obstinés. Les défis insensés et les éclats de bonheur.
Les moqueries déguisés, dans l’observation critique des corps dénudés sur la plage.
La recherche désespérée de la meilleure paella, des meilleurs fruits de mer. Le sentiment d’être des esthètes du goût.
L’oubli total des ennuis de la routine parisienne et de la depression et de l’angoisse. Et de la maladie...
Les moments d’extase dans les bras l’uns de l’autre, dans la Méditerranée. La sensation de l’eau qui glisse le long de ma peau tandis que, portée par ses bras, je me laisse bercer dans l’eau.
Sa beauté violente à chaque instant; dans la lumière qui décline, dans son visage mouillé et salé par la mer, dans le regard des passants. Partout.
Notre beauté frappante et les compliments gratuits, gentils, des gens croisés dans la ville.
Les soirées, les nuits, de plaisir inconnus découverts ensembles à des moments inattendus. La première fois qu’une telle extase m’inonde, si bien que mon corps éjacule de plaisir. Et que la honte me taquine, un peu. La première fois qu’il se laisse aller à jouir pour lui même, entre mes lèvres, contre ma langue. Le flottement radieux et éternel des instants de l’après.
Les petits cadeaux, les petites attentions, le bonheur simple des ballades en silence, des dîner sur une place, des churros sur la plage.
La découverte, précieuse, prometteuse, de ses valeurs, de ses habitudes. Et le dépassement, hilarant, de la honte des choses qu’on veut cacher à l’amour.
Le lien encore plus fort entre nos deux corps, nos deux esprits amoureux.
La sensation de l’évidence. Que c’est lui, que c’est lui. Que c’est moi. L’absence de questions. L’absence magique de doutes.
Bonheur indicible.
Et peur qu’il ne s’évapore.
J’ai cette impression qu’on vit en sursis. Et que chaque bouffée d’oxygène inhalée est un cadeau.