Journal de fin de jeunesse

J'pleure

Je pleure tout le temps. Je pleure beaucoup.Je pleure souvent. Tout est prétexte aux larmes. L’hiver a commencé. Les larmes abondantes et chaudes, qui caressent les joues comme la main d’une maman. Les larmes piquantes et froides qui ne portent rien avec elles. Les larmes qui ne passent pas le bord des cils, pour cause d’impossibilité immédiate de couler. Les larmes qui restent derrières les pupilles, et qui font du paysage un Monet en fin de vue. Mes larmes. Pourquoi vous ne vous tarissez jamais?
Je pense. Je sais. Je sais que je n’ai pas pleuré quand maman est morte. Pas vraiment. Pas avec douleur, pas avec fracas, pas avec franchise. D’ailleurs, la douleur atroce, je l’attends toujours.
Alors je pense que, tout ce que je pleure maintenant, c’est un petit peu à chaque fois de ce que j’aurai du pleurer à ce moment. (Cette nuit, maman est morte.)
Je pense que mon chagrin et ma douleur atroce tant attendue, ils se manifestent parcimonieusement dans mes crises de larmes d’aujourd’hui. Larmes chaudes. Ou larmes qui piquent et qui étranglent. Larmes retenues. Larmes cachées.

Papillon, si je pleure beaucoup, n’ai pas peur. Si je pleure maintenant c’est que je n’ai pas pleuré à tant tout ce que j’aurai pu pleurer quand j’aurai du pleurer.

Je viens de commencer le livre Maintenant qu’il fait tout le temps nuit sur toi, de Mathias Malzieu. C’est un livre qui parle du deuil de la mère dans une poésie en hiver. Les premières pages sont exactement ce que j’ai besoin de lire.