Journal de fin de jeunesse

Papilloma...

Je me sens d’humeur tellement mélancolique. Je marchais dans la rue, une lumière grise de conte macabre face à moi. Le vent soufflait fort, s’amusait à tirer mes cheveux vers le haut. Il voulait les emporter avec lui. (C’est étrange, j’ai voulu écrire "le vent soufflait fort" et je viens de le corriger car j’avais d’abord écrit "le vent soufflait mort").
Je me demande comment va papa. Je l’appelle beaucoup moins qu’avant. Qu’avant quoi ? J’en ressens moins le besoin. Je crois deviner qu’il va bien. Est-ce que je vieillis ? Est-ce que je m’éloigne ? Est-ce papa est triste, que je l’appelle moins ?
Là j’ai vraiment très envie des bras d’un homme qui m’entourent les épaules, tandis que je suis assise face à mon macbook. J’ai rendez-vous dimanche avec le garçon d’internet. On aurait du se voir aujourd’hui, mais j’ai annulé. J’ai trop peur d’être déçue, une fois de plus. J’ai annulé parce-que je ne me sentais pas prête à ça : être déçue.
Je ne me sens pas à ma place au travail, pas avec cette collègue qui prends toute la place. Je ne sais plus comment me sentir face au travail. Je déteste profondément ce qu’on appelle "le monde du travail". Le monde merveilleux du travail. Et pire encore depuis la soirée Charleston. Celle où je n’apparaît sur aucune photo. Le monde du travail… Mais qui est à l’origine de cette absurdité contre-nature que les gens aiment qualifier de "vraie vie" ?
Il est temps que je m’envole. Que je m’envole.
Il paraît que la boîte ouvre une boutique à Bordeaux. Je crois que ça m’irait mieux. Et ça me rapprocherait de mon frère. Même s’il m’est difficile de m’envisager loin de Paris. Il y a tout ici, les parcs, les opportunités de rencontre, les cinémas variés, les expo, les bar à thèmes, le mouvement, le romantisme… Mais je ne me sens pas parisienne. Je vois toutes ces filles, dont ma collègue, qui passent leur temps à faire du shopping ou à planifier leur prochaine séance de shopping. Je me sens tellement loin de ça. Et de toute façon, il ne me reste que moins de 100 euros pour finir le mois. J’ignore comment je vais faire.
La gynéco a confirmé ce que je craignais; un condylome. Lié au papillomavirus. Un cadeau de BoBo. Il me dégoute encore plus… à Ce stade je n’ai pas à m’inquiéter. Mais je dois me soigner avec une crème hyper forte qui traite, entre autre, les cancers de la peau. Les carcinomes je crois. çA me fait drôle.
Ce qui me fait peur, c’est que ce genre de lésion est rare. Normalement, ça apparaît quand le sujet souffre d’une baisse d’immunité. Une baisse d’immunité, et voilà ma hantise du VIH qui recommence. Avec toutes mes conneries...
J’étais belle à la soirée Charleston. Très belle. Et personne n’était là pour le voir.